un beau vélo
Le rêve, un vélo tout neuf qui brille sous le soleil. Un rouge comme une cerise bien mûre, avec une selle en cuir, ça fait chic ! Un klaxon dernier cri bien mieux qu'un "pouet-pouet". Un petit panier devant pour y ranger mes jouets. Avec un antivol pour ne pas l'égarer. C'est mon souhait. Celui que j'ai écrit à côté de mon dessin à la craie. Je lui ai envoyé et j'ai tout fait comme on m'a dit. Puis j'ai compté les jours et les nuits. Le jour enfin est arrivé, celui on va se glisser sous la couette, les yeux rivés au plafond, le coeur gonflé d'espoir et de chansons. Le tic tac de la pendule qui sonne minuit puis les yeux qui se ferment malgré l'envie, celle de rester éveillé toute la nuit dans l'espoir de l'aperçevoir l'homme à la barbe blanche et aux cheveux gris. Le petit matin, je m"étire puis tout à coup je me souviens ! Alors je me précipite nus pieds dans l'escalier pour arriver en trombe dans le salon. Tout est calme et vide, la maisonnée n'est pas encore réveillée. Le sapin décoré de ses artifices lui aussi dort encore. Pas un bruit de sonnette ou de roue qui crisse sur le gravier pour s'annoncer. Au pied de l'arbre de fête quelques paquets entassés, rien à l'horizon qui ressemblerait à une bicyclette. Mon coeur se sert, je refoule mes larmes pour ne pas avouer ma déception et mon chagrin. Ma petite soeur arrive en hurlant de joie et se précipite sur moi. Enfin, mes parents encore endormis et les yeux endoloris d'avoir trop veillés. Je regarde ma soeur, l'air hébété découvrir ses jouets. J'aimerais être à sa place et ne jamais avoir espéré. L'attente de ces mois interminables, pour un Noël gâché. Tous ces espoirs de virée dans les prés, seul sur mon cheval d'acier. J'aurai voulu être comme elle, à cet instant, insatiable devant ses cubes et ses poupées. Puis maman me tend un minuscule paquet, ridicule dans un papier doré. Son sourire me touche, si elle savait à quel point je suis désespéré. Je déballe sans envie, pour y découvrir une minuscule clé. Là à cet instant précis j'ai compris ! Cette clé est bien celle du paradis ! Celle qui va ouvrir mon désir le plus cher, de m'évader des journées entières et rentrer le soir, ivre de fatigue et de joie d'avoir arpenté tous les chemins et m'être égaré dans les bois. Une petite clé sans prétention et pourtant celle qui me donne la plus grande émotion !